Les bureaux clermontois à la Belle-Epoque
En 1836, le Guide du Voyageur à Clermont-Ferrand, de Jean-Baptiste Bouillet, note qu'il existe dans la ville un "fort ancien" établissement de poste (un bureau est établi à Clermont depuis au moins 1639), situé près de la place d'Espagne, et que deux boîtes supplémentaires ont été récemment établies à l'angle des rues Saint-Genès et Saint-Esprit et des rues des Gras et de l'Ecu. Le Vrai Guide de Clermont-Ferrand de 1852 nous donne la localisation du bureau, au poids de ville, ainsi que celle des six boîtes supplémentaires, à la Préfecture, à l'Hôtel-Dieu, rue Pascal, rue des Gras, rue des Jacobins et à Montferrand, rue de la Rodade. En 1855, on compte deux nouvelles boîtes, rue Blatin et Cours Sablon, et dix ans plus tard, encore deux, qui sont installées rue de l'Ecu (actuelle avenue des Etats-Unis) et Barrière d'Issoire.
Dans le prolongement de la place d'Espagne, le bureau du Poids-de-Ville (place Gaillard).
A la Préfecture, le Télégraphe, et la recette du Cours Sablon, nommé ici boulevard Trudaine.
A la fin du XIXème siècle, la ville de Clermont-Ferrand offre au public les services, d'une part, d'un bureau des Postes, recette composée mixte de 3° classe, dite Recette Principale, située place du Poids-de-Ville (place Gilbert-Gaillard), et d'autre part d'un bureau des Télégraphes, le Central télégraphique, installé à la Préfecture. Ce dernier deviendra postal à une date restant à préciser, la recette composée télégraphique de troisième classe de Clermont-Ferrand Central étant classée, par ordre d'importance, au trente-troisième rang de sa catégorie (sur 86 bureaux) dans la nomenclature de juillet 1887.
Classement des recettes de poste (D.M. du 15 juillet 1886).
Bulletin mensuel des P. & T. n°9 supp., septembre 1887.
A ces deux bureaux, il convient d'ajouter un agent entreposeur installé à la gare, chargé de l'échange des dépêches postales avec les bureaux ambulants et convoyeurs. On peut remarquer que l'appellation de l'Hôtel de la Poste, place de Jaude, n'a pas de rapport avec la poste aux lettres, mais qu'il était situé à proximité de la poste aux chevaux et des messageries.
Selon la définition donnée par l'article 31 de l'Instruction générale de 1868, un receveur des Postes est titulaire d'un bureau de recette simple lorsqu'il le gère seul, ou d'un bureau de recette composée si il le gère avec l'assistance d'un ou de plusieurs commis titulaires. Le classement de la recette est fonction de son importance, et il détermine le traitement du receveur. Une recette est mixte lorsqu'elle propose le service postal et télégraphique.
La recette composée du cours Sablon
Dès 1890, les élus clermontois proposent de demander la création de nouveaux bureaux de poste à Clermont-Ferrand, comme cela a lieu dans les autres grandes villes, qui desserviraient les quartiers le plus éloignés du bureau principal. Une création est proposée près de la Préfecture, l'autre choix étant laissé à la municipalité (CG P-de-D 1890/08).
Créée par un arrêté du 26 avril 1895, une recette composée de 4° classe ouvre ses portes au public clermontois le 21 mars 1896 (rapport du directeur des poste, CG P-de-D 1896-08). Elle prend la dénomination de CLERMONT-FERRAND-COURS-SABLON, suite à une décision du Directeur général des P. & T. datée du 7 février 1896 (B.M. n°2 annexe - février 1896). Elle sera ensuite rapidement promue à la troisième classe.
Cette recette était située à l'intersection du cours Sablon, du boulevard Trudaine et de la rue Delarbre, entre le Quartier Général et la caserne du 121ème d'Infanterie, proche de la Caisse d'Epargne et de la Banque de France. Elle n'a toutefois pas attiré l'attention des photographes, et il semble bien difficile d'en trouver la représentation sur une carte postale de l'époque, les opérateurs prenant un malin plaisir à la tenir hors du champ de leur appareil.
La mutation du Central télégraphique
Le Central télégraphique de Clermont-Ferrand est intallé, à titre gratuit, à la Préfecture du Puy-de-Dôme depuis de nombreuses annés, d'abord dans les locaux mêmes (convention du 4 mars 1853 entre le Département et les Télégraphes), puis dans un immeuble adjacent (convention du 2 mars 1868, id.). Mais à la fin de l'année 1899, le Conseil général décide de revenir sur la gratuité, et de demander un loyer de deux mille francs annuels à l'Etat (CG P-de-D 1900/04). Ce revirement va amener l'Administration des Postes et des Télégraphes à repenser l'organisation de ses services à Clermont-Ferrand : elle propose alors le déplacement du Central télégraphique vers des locaux plus vastes, de lui adjoindre un service postal, et d'installer à sa place la recette mixte alors située cours Sablon, sous le nom de Clermont-Préfecture. La ville disposerait ainsi de trois recettes mixtes des P. & T. (note du Directeur des Postes et des Télégraphes du département du Puy-de-Dôme, 26 mars 1900). Il semble qu'un service postal auxiliaire ait été installé dans les locaux du Central télégraphique avant août 1901 (bulletin des postes n°10 annexe).
Après plusieurs années de gestation, un rapport du Directeur des Postes au Préfet du Puy-de-Dôme (CG P-de-D 1908/09) nous donne les détails du projet concernant :
- le maintien de la Recette Principale, avec service postal et service électrique, dans le local situé place Gaillard, réaménangé et agrandi ;
- l'installation du poste central télégraphique et téléphonique, avec adjonction du service postal, dans un immeuble à construire, à l'angle des avenues de la Gare et Charras ;
- le déplacement du bureau composé du cours Sablon vers le bâtiment départemental jouxtant la Préfecture, après le déménagement du poste central télégraphique et téléphonique.
Après acceptation du dossier par le Conseil général, un projet de bail est dressé en juin 1909, comprenant la location par l'Administration des P. & T., pour dix-huit ans* à compter d'octobre 1910, de divers locaux dans l'immeuble départemental sis boulevard Desaix et rue Saint-Esprit, afin d'y installer l'ancienne recette du cours Sablon.
Empreinte de machine Daguin équipée d'un seul timbre à date (1920).
A cette date, le carré publicitaire n'est pas encore en service.
A la fin de l'année 1910, après l'installation du Central télégraphique dans ses nouveaux locaux de l'avenue Charras, l'ancienne recette du cours Sablon est renommée Clermont-Ferrand-Préfecture (libellé CLERMONT-FERRAND PREFRE) par un arrêté du 3 décembre. Les
empreintes portant le libellé CLERMONT-FERRAND-COURS-SABLON n'auront donc servi qu'un peu moins de quinze ans.
Il est indiqué, lors d'une séance du Conseil général tenue le 21 avril 1909, que "l'entrée du bureau serait établie rue Saint-Esprit". On constate sur les photos que le perron d'accès à l'ancien bureau du télégraphe, donnant sur la place des Petits-Arbres, a disparu.
Le nouveau central de l'avenue Charras. Un observateur pointilleux a corrigé l'erreur
de légende, la "Grande Poste" étant la recette principale de la place Gilbert-Gaillard.
Quand au nouveau bureau des Postes et des Télégraphes du quartier de la gare, il utilise des timbres à date au type 1904, portant le libellé CLERMONT-FERRAND-CENTRAL PUY-DE-DÔME. La désignation fait référence non pas à la position géographique ou hiérarchique de la recette, mais plutôt au Central télégraphique qu'elle héberge. Un dateur portant l'abréviation CAL sera employé par la suite.
* A la suite de l'édification de l'Hôtel-des-Postes (l'actuelle "grande poste Saint-Eloy", ci-dessous), situé à moins de deux cent mètres de la préfecture, et qui
abritera désormais la recette principale, le bureau de Clermont-Préfecture sera supprimé (CG P-de-D 1936).
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La recette simple de Montferrand
L'ouverture d'un bureau de poste annexe à Montferrand, demandée à plusieurs reprises par les élus clermontois au cours des années 1870 (CG P-de-D 1874, 1877), a été systématiquement refusée par l'Administration, en raison de l'exiguïté des crédits budgétaires. Par un arrêté du 15 juin 1879, la concession de recettes simples des postes est autorisée aux communes s'engageant à subvenir à leur dépense : c'est l'acte de naissance des recettes municipales (B.M. 14, 2° supp., juin 1879). Celle de Montferrand a été inaugurée le 6 juillet 1881 (CG P-de-D 1881/08)***, et elle accueille le télégraphe à partir du 16 septembre de la même année (B.M. 42, octobre 1881).


Il est possible qu'à l'origine, le bureau ait été installé dans le bâtiment qui abritait la Justice de Paix et le Poste de Police, rue de la Fontaine, local dont la commune supportait déjà les frais, ce qui devait limiter le coût d'installation de la recette municipale. Ce bâtiment se trouve à gauche sur la photo ci-dessus, au premier plan. De nos jours, le bureau de poste de Montferrand est situé dans ce même bâtiment, qui abrite également la mairie.
La recette est désignée
CLERMONT-FERRAND-SON-DE-MONTFERRAND, le
SON
signifiant, en l'occurence,
section***. Elle est transformée en recette simple des postes de 4° classe par décision du 20 octobre 1883,
conservant son "numéro blanc"
7067. L'abondance de lettres dans la couronne, plus importante encore que sur les marques du cours Sablon
vues un peu plus haut, ne facilite pas franchement la lecture sur les petits timbres à date
type 84.
Après le renouvellement de son matériel oblitérant, au début du vingtième siècle, les timbres à date de cette recette afficheront plus simplement l'intitulé MONTFERRAND PUY DE DÔME
*** Dans le vocabulaire administratif de l'époque, la section électorale désigne une partie de la commune dotée de ses propres conseillers municipaux. En 1881, la commune de Clermont-Ferrand se composait de la section de Clermont, qui possédait 26 conseillers pour 32.191 habitants, et de celle de Montferrand dotée de 4 conseillers pour 3918 habitants.
Le guichet annexe du boulevard Lafayette
Les établissements postaux situés boulevard Lafayette ont fait preuve d'une discrétion de violette au cours de la première partie du vingtième
siècle. Nous avons vu qu'une recette auxiliaire a ouvert en décembre 1912 dans un lieu non déterminé, peut-être chez un débitant de tabac installé dans l'immeuble de l'actuel n°25 (qui abrite encore de nos jours un tabac-presse). Cette R.A.U. a probablement fermé au début de la Grande Guerre, et elle n'avait toujours pas réouvert en 1923. Nous ne connaissons pas de marque postale de cette établissement, qui portait la lettre D, et qui a pu servir seulement pendant un an et demi.
Dans le courant des années suivantes (après 1928), un guichet annexe, établissement secondaire dépendant d'une recette, est ouvert sur le boulevard, au numéro 42, si l'on en croit le Livre-guide de Clermont pour 1932 (Le Moniteur, Mont-Louis). Nous en connaissons quelques marques, pas extrêmement lisibles, portant l'intitulé CLERMONT-FD BVARD LAFAYETTE P. DE D. Une proposition est faite en 1938 (CG P-de-D 1938) pour le transformer en recette, mais il sera fermé en 1945, faute d'un local suffisant (CG P-de-D 1945-10).